Elisabeth OLLÉ CURIEL Espagnole, b. 1960
Selva y Musica
Huile sur toile
100 x 81 cm
€3,000.00
Univers magique qui est l'archétype de l'inconscient, la ville est bien le reflet de ce mystère de la conjonction entre visible et invisible où les échanges se font à notre...
Univers magique qui est l'archétype de l'inconscient, la ville est bien le reflet de ce mystère de la conjonction entre visible et invisible où les échanges se font à notre insu. Oscillant en permanence sur des lignes frontières, New-York est cette présence en devenir des romans de Paul Auster. L'immersion que recherche l'artiste dans les effets troublants d'un monde autre que le signe de l'ouverture à l'inattendu. Les aquarelles de cette période (2003) éclairent la relation entre une voyageuse et une ville en constante mutation, porteuse des promesses de l'Amérique. Fashion capital of the world, capitale du jazz, forêt de gratte-ciel, la ville est cet espace inépuisable de désirs, de transgressions et d'affects.
New-York acceuille comme une mère les solitaires en quête d'une âme, la leur et celle du monde avec une puissance mythique. La ville est à la fois une Babylone et un océan. Eden ou enfer, elle révèle aux êtres perdus leur véritable vocation. Elisabeth déploie un paysage plus mental que réel, revenant à la Caraïbe que est la racine de l'œuvre, sa matrice et sa matière. Le lieu où le désir s'affranchit. Les visages noirs, l'expressionnisme, l'hommage à l'Afrique, à la mode et à la bande dessinée évoquent l'éclectisme de Basquiat en surimpression. La musique, les offrandes aux ancêtres, les vestiges d'un culte à Maria Lionza, la symbolique religieuse de sa peinture semblent restituer l'épiphanie de rites et de cérémonies, sacrées et profanes. Elle fait resurgir des mondes enfouis, des alchimies occultes, des échos intarissables de rébus et de hiéroglyphes, d'entrelacements qui sont autant d'arcanes de son humanité. New-York est la troisième ville haïtienne dans le monde, après Port-au-Prince et Miami, dans une constellation d'identités paradoxales, rituels de filiation, de prière et sorcellerie, de salut et de transformation, elle cristallise une multitude de voies secrètes. L'exaltation du métissage passe par une série d'aquarelles où l'on retrouve la force noire, blanche et indigène, à la base de la composition ethnique vénézuélienne. Peut-être une réinterprétation des orixas, peut-être la figure du griot, le passeur de traditions. Le corps africain-américain devenu une icône se décline dans un miroir baroque et jazzy, hanté selon Maria Gomez Alarcon, par les vestiges de Choroni : "les visages des afro-américains apparaissent couronnés, souvenirs des jungles vénézuéliennes, ou trace de l'Afrique dans l'inconscient. Les tableaux tressent des ponts secrets entre les points cardinaux continentaux, l'Amérique, l'Europe et l'Afrique, remontant, à travers la fiction d'une vie d'artiste aux mythes permanents du destin.
Delphine Durand, docteur en Histoire de l'Art